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Dimanche de la patience

La patience est un fruit de l’Esprit ! La Parole de Dieu qui nous est proposée ce dimanche nous invite à méditer sur la patience, un investissement qui porte ses fruits dans notre vie et dans l’histoire. Il est vrai que nous vivons une époque où les gens manquent de patience. La Parole de Dieu nous présente le Royaume des cieux comme une expérience de patience. On y comprend ce qu’est la patience. Elle est différente de la passivité, c’est agir dans le temps de Dieu, et avec délicatesse !

 

Les textes

1e lect : Lecture du livre du prophète Ézékiel (Ez 17, 22-24)

Psaume 91 R/ Il est bon, Seigneur, de te rendre grâce !

2e lect : Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens 2 Co 5, 6-10

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc (Marc 4, 26-34)

 

L’un des fruits de l’Esprit Saint, c’est bien la patience. La patience est une force et non une attitude. On doit éviter de la comparer à de la passivité, à l’attitude de celui qui reste observer, et prendre ce qui lui arrive. Jésus utilise deux paraboles pour nous enseigner ce dimanche, et ces paraboles se servent de la figure de l’agriculteur et de sa patience.

La seconde lecture nous invite auparavant à avoir confiance au Seigneur, et de tout faire pour lui plaire. C’est le désir le plus fort du croyant que de chercher à plaire au Seigneur. Dans notre époque, nous attachons une bonne importance à l’art de plaire. Et on voit comment les centres de cosmétique font des affaires dans ce sens. L’énergie et les ressources que l’homme met dans cette recherche du plaire extérieur, doit aussi être engagé sur le plan intérieur. Et la Parole de Dieu nous révèle que pour plaire au Seigneur, il faut justement travailler pour le Royaume de Dieu.

C’est dans ce travail pour le royaume que la Patience devient une manière d’agir de Dieu. Les textes nous décrivent la patience comme une valorisation de l’œuvre de Dieu en sa présence. La patience c’est savoir entrer dans l’œuvre de Dieu et dans le temps de Dieu.

La première lecture nous enseigne que l’une des premières choses que l’homme doit savoir, est que Dieu agit dans l’histoire. Nous n’avons souvent plus le temps de contempler l’œuvre de Dieu dans l’histoire. Le plus souvent, nous sommes tellement aveugles que nous devenons incapables d’action de grâce. Les chrétiens deviennent de plus en plus incapables de louanges véritable. Et souvent dans chaque louange adressée au Seigneur, il y a plus de demande que de reconnaissance.

Il suffit de voir ce que nous répondons lorsqu’un ami nous demande comment tu vas ? Les réponses sont toujours hésitantes : « On est là » ! « sauf la galère » ! « On pousse on met la calle » ! J’ai difficilement vu des personnes qui répondent de manière allègre : « je vais bien et je loue le Seigneur ».

C’est une attitude qui traduit une méconnaissance de ce que le Seigneur met à notre disposition. Et si tu n’as pas conscience que le Seigneur a mis des choses à ta disposition, tu ne pourras pas savoir les mettre en valeur. Tu ne pourras rien semer.

L’évangile nous parle de l’agriculteur qui sème. Il a conscience d’une série de dons : la terre, le climat, la semence. Mais si tu es même incapable de voir la semence. Tu risqueras la griller afin de montrer que ta vie n’a vraiment pas de sens. Si tu ne fais pas confiance au temps et au climat, si n’as pas conscience que la terre est là, et prête à multiplier le grain qui tu voudras bien y mettre !

Notre pauvreté ne vient pas souvent du fait que nous n’avons rien, mais du fait que nous ne voyons pas ce que nous avons. Si nous ne voyons pas ce que Dieu fait pour nous, nous ne serons capable de rien, car nous allons pleurnicher, nous lamenter. Jésus nous enseigne à travers ses paraboles de ce dimanche comment la reconnaissance de l’action de Dieu, ce qui rend possible la valorisation du don de Dieu. Puis, arrive l’action ! Il faut semer.

L’une des tentations dans la vie spirituelle est de vouloir séparer ou d’opposer la recherche du Royaume des cieux et la transformation de ce monde. Nous avons le don de Dieu à valoriser, et ceci dans tous les domaines : matériels, spirituels, intellectuels, humain, pour ne citer que ceux là. La parabole nous indique qu’il faut naturellement semer, et compter aussi sur l’action de Dieu dans sa providence. Nous découvrons par là l’action et la valeur de la patience. La patience qui est fruit de l’Esprit signifie faire ce qui est en son pouvoir et devoir, et attendre aussi que Dieu agisse selon l’ordre de son temps.

L’évangile nous présente donc aujourd’hui le Royaume de Dieu en termes d’action de Dieu et de réaction de l’homme. A cela suit à nouveau l’action de l’homme, et la réaction de Dieu. La description de l’action de Dieu est assez frappante. C’est une graine toute minuscule, quasi insignifiante, arrosée par la patience. Au terme de la patience qui accompagne sa croissance, cette plante dépasse toutes les plantes sagement alignées dans le potager.

Le Royaume de Dieu est aussi présentée comme action de l’homme, suivie d’une patience qui est le temps de l’action de Dieu. Nous croisons dans l’évangile un homme qui plante sans trop investir d’efforts par la suite. Il ne fait pratiquement rien… et la moisson surgit malgré son inertie! On comprend donc que le règne de Dieu, orienté malgré les péripéties de l’histoire vers la victoire, repose avant tout sur la confiance des humains dans l’action de Dieu.

Nous trouvons cette annonce dans le programme de Dieu transmis par le prophète Ézékiel dans la première lecture. C’est un magnifique programme de croissance. Cette lecture décrit un processus de bouleversement propre au règne de Dieu : Je renverse l’arbre élevé et relève l’arbre renversé, je fais sécher l’arbre vert et reverdir l’arbre sec. Autrement dit : avec Dieu, les apparences n’ont jamais le dernier mot. Il y a toujours des surprises et des bouleversements. Ces images nous frappent à plusieurs titres en ce dimanche où nous fêtons les papas. Dieu donne l’image d’un papa qui inspire confiance à ses enfants par sa sagesse, et aussi par sa patience.

La patience de l’homme est un engagement de celui-ci dans la confiance, à valoriser ce que Dieu lui donne, je dirais à semer comme s’il était seul. Pour cela, il doit savoir valoriser la semence et la terre. C’est sans doute un de nos problèmes en Afrique. On a l’impression généralisée que nous n’avons jamais rien. La Parole nous dit que ne pas savoir voir la semence qu’on a, ou encore la terre qu’on possède, rend impossible l’action transformatrice et productrice.

La patience de Dieu qui est action et attente délicate, fait aussi penser aux papas qui rêvent tous voir leurs enfants devenir grands, adultes et responsables. En ce temps où on va vite et où on perd la patience, il est impérieux de remarquer que la perte de patience a souvent poussé certains papas à être indélicats avec leur enfant. Combien de filles ou garçons souffrent dans leur vie parce que papa a dessiné arbitrairement et sans patience leur futur.

Tout ne s’arrete pas là ! Nous devons reconnaitre qu’il y a une bonne partie de volonté dans le succès d'une vie de père. Mais, vu la complexité actuelle de la vie, tout père qui réussit à soutenir ses enfants, à les insérer dans la trame de la vie autonome en société sent très bien qu'il n'a pu accomplir cela tout seul... Il y a l’action mystérieuse de Dieu qui fait pousser ce qu’on sème, si on accorde à Dieu l’espace de sa patience et de sa présence. Dieu voit toute chose, même la poussée de croissance d’un enfant lorsqu’elle est soutenue discrètement par un papa timide. Rendons grâce pour la clairvoyance de Dieu qui nous donne des pères engagés et discrets à la fois!

La Bible évoque plusieurs fois l’expérience d’une paternité qui livre ses bons fruits. Par exemple cette idée de l’évangile : d’elle-même la terre produit son fruit. Il se passe de bien belles choses à l’abri de notre regard. Comme tout père en fait l'expérience lorsqu’il doit lâcher prise devant la croissance imprévisible de son ado, ...nous cheminons dans la foi, non dans la claire vision... (deuxième lecture, 2 Corinthiens 5,6-10). Ces expériences étonnantes de la paternité rejoignent l’expérience de chaque personne qui fait place à la foi dans son quotidien.

Quand les enfants grandissent, souvent les papas déplorent de voir leur autorité facilement contestée. Les vacances deviennent une période de souffrance pour les parents : après neuf mois à l’école, ils se retrouvent avec de grands enfants à longueur de journée. Et gérer la surprise n’est pas facile. Souvent on cherche moyen de les éloigner à nouveau, et un jour on se rend compte qu’on les ignore totalement ! La patience est aussi cette sagesse qui nous fait semer, et permettre à Dieu de faire pousser, et cela se passe sous nos yeux. C’est parfois frappant de voir des papas capable de gérer une entreprise de plus de cent personne, mais de ne pas pouvoir gérer cinq enfants. Il a eu le temps et la patience d’étudier son entreprise et de la connaitre.

La puissance de Dieu (décrite dans la première lecture) a de quoi les faire rêver : Je renverse l’arbre élevé et relève l’arbre renversé; je fais sécher l’arbre vert et reverdir l’arbre sec... Quel père ne rêve pas de voir le terme de la croissance de son enfant? Ou de le protéger des dangers de la vie et de la croissance en prenant le contrôle sur tout ce qui arrive?

Nous pouvons aussi, à la faveur de cette fête des pères conclure ainsi : « Le Règne de Dieu est comparable à un père de famille qui investit sa confiance dans le terreau de la croissance de ses deux filles. Il voudrait que rien de mal ne leur arrive, mais le contrôle sur leur vie le dépasse. Sans qu’il sache comment, qu’il veille ou qu’il dorme, chacune des filles devient elle-même. À son tour, chacune multiplie les générosités qu’elle a reçues… » Et il n’est pas interdit que cette figure s’applique à plusieurs autres aspects de ta vie.

« Le Règne de Dieu est comparable à un croyant qui investit sa confiance dans le Seigneur et engage ses projets. Il voudrait la réussite de ce projet, mais le contrôle sur l’histoire le dépasse. Sans qu’il sache comment, qu’il veille ou qu’il dorme, Dieu travaille avec lui et regarde sa patience. Puis ce projet devient le projet de sa vie, de sa bénédiction. Sa patience et sa confiance ont payé … »

Bon dimanche et bonne fête des pères

Abbé André Marie Kengne

Mouvement Pro discipulatis

 

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